10. RÉANIMATION (Vh : 90 h, Coef : 3)

Objectif de l’enseignement :

Reconnaître les différentes pathologies médico-chirurgicales nécessitant une réanimation

Le manuel de réanimation, soins intensifs et médecine d’urgence.Jean-Louis Vincent Chargé de cours à l’université de Bruxelles Chef du service des soins intensifs de l’hôpital Erasme Université libre 

I.        Définition des soins intensifs (réanimation)

Les unités de soins intensifs (USI) ou de réanimation correspondent à des regroupements :

  • de patients,
  • de matériel,
  • de personnel soignant.

a.     Patients

  • Traditionnellement, les USI servent à la surveillance et au traitement des patients dont les fonctions vitales sont en danger.
  • N.B: Cette définition est élargie aujourd’hui, puisque des malades peuvent être admis pour surveillance et traitement même lorsque les fonctions vitales ne sont pas en danger.

Exemple:

un malade développant une oligurie de cause mal déterminée, chez qui une thérapie liquidienne énergique pourrait être bénéfique (en cas d’hypovolémie) mais aussi risquée (en cas d’anurie installée), si bien qu’un monitorage rapproché est souhaitable.

                                  i.    Patients admis en USI suite à …

  • Une urgence non programmée: polytraumatisme, hémorragie cérébrale, choc septique…,
  • Une dégradation plus progressive qui va en s’aggravant : insuffisance cardiaque ou respiratoire
  • Un état peu altérés mais à risque de complications à court terme: épiglottite, intoxication…
  • Une programmation: après chirurgie lourde (cardiaque, neurochirurgie…) ou procédures à risque (radiographie interventionnelle cérébrale) ;
  • Pour désensibilisation à certaines allergies (piqûres d’insectes), chimiothérapie lourde…

                                 ii.    Taux de mortalités

  • normal= entre 15 et 20 %.
  • population traitée peu sévèrement atteinte < 15 et 20 %.
  • la population trop sévèrement malade ou qualité des soins médiocre > 15 et 20 %.

b.     Matériel

  • Besoin de matériel sophistiqué ;
  • de traitement: ventilateurs, hémofiltration, ballon de contrepulsion…;
  • de surveillance : monitorage cardiovasculaire, respiratoire, neurologique…;
  • de diagnostic : appareil transportable de radiographie, d’échocardiographie, appareils de laboratoire d’urgence (gaz sanguins, lactate, ions, glycémie, hématocrite…).

c.     Personnel spécialisé

  • médecins spécialistes : on exige dans la plupart des pays une spécialité primaire (médecine interne, anesthésie, chirurgie ou pédiatrie) et deux années de formation spécifique en soins intensifs ;
  • infirmier(e) s spécialisé(e) s, qui doivent aussi souvent avoir un brevet de compétence en soins intensifs ;
  • kinésithérapeutes ;
  • techniciens (indispensables au maintien du matériel) ;
  • secrétaires…

II.        Historique

  • Le terme de réanimation est employé pour la première fois en 1953 par le médecin français Jean Hamburger, pour désigner les moyens permettant d'assurer le retour à l'homéostasie, dans le cadre de travaux qui débouchent un an plus tard sur la mise au point du premier rein artificiel.
  • La réanimation est également issue des techniques de respiration artificielle élaborées dans les années 1950 au Danemark, puis en France, pour compenser la paralysie respiratoire des malades atteints de poliomyélite
  • Nombre de lits USI par rapport au nombre total de l’hôpital
  • Il est aujourd’hui de l’ordre de 5 à 10 % en Europe, en fonction des pays et des hôpitaux.

 III.        Problèmes éthiques

a.     Les quatre grands principes d’éthique.

  1. Autonomie: droit de la personne de prendre sa santé en charge et par là de refuser certains traitements.
  2. Bienfaisance : faire le bien au patient ; c’est en fait le but de la médecine de restaurer ou de maintenir la santé, définie comme le bien-être physique et psychique de l’individu.
  3. Non-malfaisance : ne pas nuire au patient « primum non nocere ».
  4. Justice distributive : assurer les mêmes chances à chacun de bénéficier des services.

Ce principe régit les rapports avec les autres patients et la société entière : distribution des organes à transplanter, définition des priorités en médecine de catastrophe, attribution des lits d’USI en cas de limitation du nombre de lits…

b.     Admission en USI

 Deux critères doivent être remplis :

  1. le problème doit être sérieux et nécessiter un monitorage et/ou un traitement intensif. (fonctions vitales sont défaillantes ou en danger de défaillir)
  2. le patient doit avoir des chances raisonnables de recouvrer une vie satisfaisante.

c.     Exception pour l’admission en USI

  • Fin de vie [= si la mort vient à son heure] ; l’âge chronologique n’est pas un critère suffisant ;
  • Stade terminal de la maladie (cancer, cirrhose…),
  • État végétatif permanent (qui n’ont pas ou plus de vie relationnelle);
  • Qualité de vie insuffisante, suite à la maladie (cancer avancé,handicap profond….).

 IV.        Problèmes éthiques

a.     Arrêt thérapeutique

Il faut parfois placer certaines limitations au traitement.

NTBR: « not to be resuscitated » (ou DNR: « do not resuscitate ») : le traitement est complet, sauf qu’une réanimation ne sera pas appliquée en cas d’arrêt cardiorespiratoire.

b.     Non-escalade

Withholding : pas de moyens extraordinaires (« PME ») tels que ventilation mécanique, épuration extrarénale ou administration d’agents vasopresseurs en cas de choc circulatoire.

c.     Désescalade

Withdrawing (Arrêt thérapeutique) : On arrête ce qui est déjà entrepris (ventilation mécanique, agents vasopresseurs, hémodialyse ou hémofiltration…

« No treatment » (NT) : seul un traitement de confort est maintenu (morphiniques, sédatifs…) en attendant le décès à court terme. Il faut souligner qu’on n’arrête jamais les soins, mais seulement le traitement actif.

 V.        La communication

a.     Malade conscient

Respect du droit du malade à l’information et à l’autonomie

  • le malade doit savoir qui s’en occupe.
  • le malade doit prendre conscience du fait qu’il est pris en charge par une équipe, qui communique et qui agit en synergie.

b.     Famille

Il est préférable de laisser le même médecin traitant entretenir ces relations répétées, en laissant la possibilité de recourir à un supérieur en cas de difficultés ou simplement de besoin de réassurance.

En cas de familles nombreuses: proposer aux proches d’identifier un ou deux interlocuteurs privilégiés qui répercuteront l’information auprès des autres.

Lors de l’entrevue, il ne faut pas commencer un monologue, mais plutôt d’abord demander aux proches de s’exprimer et de définir ce qu’ils savent et comment ils perçoivent la situation.

Les explications doivent être fournies en termes simples, compréhensibles par tous, et sans ambiguïté inutile.

Il est souhaitable de marquer des pauses pour s’assurer de la bonne compréhension et attendre les questions éventuelles.

Parfois, la guérison ou même l’amélioration sont très improbables, et il est important de définir les buts d’absence de souffrance en toutes circonstances et de mort digne en cas d’insuccès.

Les proches doivent être invités à définir les souhaits du malade inconscient et leurs propres souhaits (y compris les conditions de leur appel en cas de complication).

                                  i.    Les étapes de la communication avec les proches.

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VI.        Le travail en équipe

  • Parfois, la guérison ou même l’amélioration sont très improbables, et il est important de définir les buts d’absence de souffrance en toutes circonstances et de mort digne en cas d’insuccès.
  • Les proches doivent être invités à définir les souhaits du malade inconscient et leurs propres souhaits (y compris les conditions de leur appel en cas de complication).

VII.        Critères de gravité des affections

Scores spécifiques

Il existe un certain nombre de scores de gravité spécifiques à un organe ou une affection :

  • le score de Glasgow: proposé initialement dans les comas traumatiques, mais étendu ultérieurement à toute forme de coma.
  • le score LIS dans l’ARDS (Le syndrome de détresse respiratoire aiguë);
  • la classification de Child dans les insuffisances hépatiques.

VIII.        Critères de gravité des affections
Scores généraux de gravité

Le pronostic du patient dépend essentiellement de trois facteurs :

  1. la sévérité de l’affection aiguë
  2. les réserves physiologiques du patient (âge, degré de nutrition, antécédents…) ;
  3. la possibilité de réponse au traitement; les facteurs psychosociaux peuvent influencer significativement cette réponse du patient.

Certains facteurs (surtout le troisième) font que le pronostic est plus facile à établir après quelques jours à l’USI qu’à l’admission !

Score APACHE (Acute Physiologic and Chronic Health Evaluation)

Le score APACHE, développé par William Knaus (USA) en 1981, comprenait initialement 34 mesures,

La seconde version (APACHE II), développée en 1985, est simplifiée, et introduit l’âge

Le score APACHE III, proposé en 1989, introduit une pondération des différents paramètres.

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  1. Score SAPS (Simplified Acute Physiology Score)
  2. Score MPM (Mortality Prediction Model)
  3. Score TISS (Therapeutic Intervention Scoring System)
  4. Score SOFA (Sequential Organ Failure Assessment)

 X.        Scores de sévérité dans le trauma

Revised Trauma Score (RTS)

  1. Injury Severity Score (ISS)
  2. Trauma Score Revised Injury Severity (TRISS) basé sur une combinaison du RTS et de l’ISS et de l’âge du patient.

XI.        Applications

  • Comparer la sévérité d’affections de différents groupes de patients : études cliniques;
  • Définir le type de patients admis dans l’USI : pour définir les besoins d’une unité en termes de personnel et d’autres ressources ;
  • Étudier la performance d’une USI : comparaison du taux de mortalité observé à un taux de mortalité attendu.

XII.        Présentation du dossier par problèmes

  • L’orientation du dossier par problèmes vise à présenter clairement les problèmes de santé du patient ainsi que les réponses du personnel soignant à leur égard.
  • Cette présentation est essentielle chez le malade grave, pour mettre de l’ordre dans les pathologies, parfois nombreuses et intriquées.
  • Les problèmes sont présentés dans leur ordre d’importance.

XIII.        Avantages de la présentation par problèmes

  • Clarté des informations.
  • Communication facilitée.
  • Réduction des erreurs par omission.
  • La tâche de chacun est mieux précisée.
  • Formation par l’expérience
  • Facilitation de la présentation orale..
  • Recherche clinique

XIV.        Transport du malade grave

  • Pour minimiser les problèmes et assurer au mieux la continuité des soins, le transport doit être planifié, en assurant une coordination des efforts de tous les membres de l’équipe soignante.
  • Transport du malade grave
  • Le transport nécessite la définition d’une série de besoins en matériel mais aussi en personnel.
  • Le malade grave doit toujours être accompagné d’un(e) infirmier(e) suffisamment expérimentée, et souvent aussi d’un médecin.
  • Précautions à prendre avant le départ :
  • S’assurer que le transport est possible :pas d’insuffisance respiratoire majeure, stabilité hémodynamique, matériel adéquat.
  • Préparer le patient : en appliquant la règle du VIP
  • Préparer le matériel
  • S’assurer que tout est prévu dans la salle d’arrivée
  • Préparer la route à suivre

XV.        Voyages aériens

  • À l’altitude habituelle des avions (9 000 à 12 000 m), la pression atmosphérique extérieure est de 150 à 250 mm Hg.
  • Les avions ne peuvent être pressurés pour maintenir la même pression atmosphérique qu’au niveau de la mer, car cela impliquerait des fuselages plus résistants et donc beaucoup plus lourds.
  • On se contente donc de pressuriser les avions à une altitude de 1 700-2 400 m.
  • Cette diminution de pression ambiante a deux conséquences importantes.
  • Voyages aériens
  • Réduction de pression ambiante en oxygène
  • La PaO2 normale (95) diminue aux environs de 75 mm Hg
  • Expansion de gaz dans les cavités fermées (phénomène des « oreilles bouchées »)
  • Danger en cas:
  • de plaies chirurgicales intraabdominales, urologiques ou oculaires,
  • en cas de pneumothorax non drainé
  • CI Voyage dans les 10 jours qui suivent une intervention
  • Penser à dégonfler le ballonnet de la SI
  • Autres effets: déshydrations et œdèmes