10.1.1. Généralités sur les médicaments anti-infectieux et antibiotiques

ANTIBIOTIQUES

Comment et sur quel cibles agissent les antibiotiques?

MODE D’ACTION DES ANTIBIOTIQUES

Les antibiotiques sont des substances naturelles capables d’inhiber la croissance bactérienne ou de tuer les bactéries. Elles sont actives sur les cellules procaryotes mais respectent en effet les cellules des espèces eucaryotes. La plupart des antibiotiques récents sont en fait maintenant des produits élaborés par hémisynthèse ou
par synthèse totale.

CIBLES DES ANTIBIOTIQUES

Les antibiotiques entravent la croissance bactérienne en agissant sur des cibles vitales. Il s’agit principalement pour les grandes classes d’antibiotiques :

  • de la paroi bactérienne : c’est le cas pour les bêtalactamines ou pour les glycopeptides; les bêtalactamines entravent la formation de la paroi bactérienne en se fixant sur des enzymes indispensables à la synthèse du peptidoglycane appelées protéines de liaison à la pénicilline (PLP);
  • du système nécessaire à la synthèse des protéines avec inhibition de la transcription de l’ARN messager : cible ribosomale et interférence avec le tARN (aminosides, cyclines, phénicolés) ou inhibition de la formation des chaînes peptidiques (macrolides, acide fusidique);
  • du système de synthèse des acides nucléiques : par action sur les précurseurs de cette synthèse (co-trimoxazole) ou sur ses enzymes (rifampicine); les quinolones empêchent la synthèse de l’ADN en entravant le fonctionnement des enzymes indispensables à l’obtention de son organisation spatiale (topo-isomérases).

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MÉCANISME D’ACTION, ACTIVITÉ ANTIBACTÉRIENNE

Pour exercer leur effet, bactériostatique ou bactéricide, les antibiotiques doivent se trouver à une concentration suffisante dans le milieu où se fait la croissance bactérienne. La concentration d’antibiotique nécessaire et suffisante pour empêcher cette croissance est dite concentration minimale inhibitrice (CMI).

La concentration minimale bactéricide (CMB) est la concentration nécessaire à l’obtention de moins de 0,01 % de survivants de la culture initiale.

Pour les antibiotiques bactéricides, la CMB est proche de la CMI.

Qu'est ce un antibiogramme?

ANTIBIOGRAMME

Lorsqu’on dispose de la souche bactérienne responsable d’une infection, après mise en culture d’un prélèvement clinique, il est possible de déterminer la sensibilité de cette souche aux antibiotiques.

L’antibiogramme est, par son résultat, indicateur de la probabilité que tel ou tel antibiotique a de permettre l’éradication bactérienne d’une souche identifiée au site de l’infection.

À condition que l’antibiotique y diffuse, et compte tenu des concentrations critiques connues, l’antibiogramme indiquera si la souche bactérienne isolée est sensible, modérément sensible ou résistante à l’antibiotique.

RÉSISTANCE

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La résistance est la propriété qu’a une souche bactérienne de ne pas voir sa croissance inhibée sous l’effet de l’antibiotique aux concentrations obtenues in vivo après administration de ce médicament aux posologies recommandées.
La résistance naturelle est une propriété de l’ensemble des souches d’une espèce : on dit alors que l’espèce est naturellement résistante. Aucune activité thérapeutique ne peut être attendue. La connaissance de ces résistances naturelles est indispensable au clinicien qui doit connaître les « trous d’activité » des antibiotiques mis à sa disposition.
La résistance acquise, en revanche, n’est pas une propriété de l’espèce. Elle résulte de l’acquisition par une partie des souches de l’espèce d’un caractère de résistance.

L’acquisition de la résistance résulte d’un événement génétique : soit mutation d’un individu bactérien au sein de la population de l’espèce (il s’agit d’une résistance
de novo); soit acquisition d’un gène de résistance porté par un plasmide ou un transposon et venu d’un autre individu bactérien.

MÉCANISMES DE LA RÉSISTANCE ACQUISE

Les mécanismes de la résistance acquise sont nombreux. Cependant, pour la majorité d’entre eux, ils résultent soit d’une inactivation enzymatique de l’antibiotique,

  • soit d’une modification de cible,
  • soit de facteurs empêchant l’antibiotique d’atteindre sa cible (imperméabilité) ou aboutissant à l’extrusion de l’antibiotique hors de la bactérie (efflux).

Certains mécanismes de résistance sont spécifiques : c’est le cas des résistances s’effectuant via la production d’enzymes bactériennes, bêtalactamases par exemple.

D’autres sont moins spécifiques et peuvent expliquer des résistances associées à des antibiotiques de classes différentes vis-à-vis d’une même bactérie
(résistances par imperméabilité ou efflux).

ÉPIDÉMIOLOGIE DE LA RÉSISTANCE
NOTION DE SPECTRE ANTIBACTÉRIEN

Pourquoi parler d'épidémiologie de la résistance ?

Le caractère inconstant de la résistance acquise, du moins en théorie, permet de comprendre que l’on puisse parler d’une épidémiologie de la résistance. La fréquence de la résistance acquise peut en effet varier selon l’espèce bactérienne, selon le type de malades ou de pathologies, selon la géographie, ou selon l’existence d’éventuels facteurs de risques parmi certaines populations de malades.

La connaissance par le prescripteur des grands traits de l’épidémiologie de la résistance acquise est indispensable à la pratique quotidienne de l’antibiothérapie, soit pour les principales espèces bactériennes rencontrées et les grandes classes d’antibiotiques, soit de manière plus spécifique, et particulièrement en réanimation, pour certaines espèces bactériennes responsables d’infections nosocomiales et dont le profil de sensibilité aux antibiotiques peut varier d’un hôpital à un autre ou d’un service à l’autre au sein du même établissement.

Comment interpréter un antibiogramme?

Le spectre d’activité d’un antibiotique résulte de la connaissance des caractères de sensibilité de populations bactériennes des différentes espèces figurant dans le spectre. Il est un élément indicatif qui permet de différencier :

  • les espèces habituellement sensibles, pour lesquelles la résistance acquise est un événement rare; certaines de ces espèces peuvent n’être que modérément sensibles (de sensibilité intermédiaire);
  • les espèces inconstamment sensibles au sein desquelles coexistent des souches sensibles et d’autres ayant acquis un mécanisme de résistance.
  • Lorsque l’infection est microbiologiquement identifiée et que l’activité de l’antibiotique peut être évaluée par l’antibiogramme sur la souche isolée, on saura si l’on a à faire à une souche sensible ou à une souche résistante de cette espèce. En revanche dans les situations d’incertitude diagnostique et de traitement « probabiliste », le
  • spectre d’activité de l’antibiotique sera alors indicateur d’une incertitude
  • sur la capacité de l’antibiotique à assurer l’éradication bactérienne de cette espèce et la guérison clinique;
  • les espèces résistantes, c’est-à-dire celles qui sont naturellement résistantes à l’antibiotique, mais également celles pour lesquelles la fréquence de la résistance acquise est telle que le produit ne peut plus être recommandé en traitement probabiliste des infections dues à cette bactérie mais non (ou non encore) documentées microbiologiquement.

ANTIVIRAUX UTILISÉS EN RÉANIMATION

La consommation d’antiviraux dans les services hospitaliers s’est considérablement accrue ces dernières années, surtout en raison du nombre toujours plus important de malades immunodéprimés et l’émergence de nouvelles infections virales. Pourtant, les antiviraux susceptibles d’être utilisés en réanimation adulte se limitent à quelques
molécules, principalement à celles actives sur les virus du groupe herpès et sur les virus de la grippe.

ACICLOVIR

L’aciclovir (Zovirax®) ou ACV est un analogue nucléosidique de la désoxyguanosine. La forme intraveineuse constitue le traitement de référence des encéphalites herpétiques, des infections systémiques à Herpes simplex virus (HSV) chez l’immunodéprimé et des formes graves d’infection liées au virus de la varicelle et du zona

FAMCICLOVIR

Le famciclovir (Oravir®) est la prodrogue du penciclovir, analogue de la guanosine. Son mode d’action et son activité antivirale sont comparables à celles de l’ACV. La forme active est le penciclovirtriphosphate qui est un inhibiteur de l’ADN polymérase.

GANCICLOVIR

Le ganciclovir (GCV) (Cymevan®), est un nucléoside acyclique synthétique analogue de la 2’-désoxyguanosine). Sa structure est proche de celle de l’ACV. L’intérêt principal de cette molécule tient à son activité sur le cytomégalovirus (CMV). Le GCV intraveineux est indiqué dans les infections graves à CMV des malades immunodéprimés mettant en jeu le pronostic vital ou la vision

ANTIFONGIQUES

AMPHOTÉRICINE B-DÉOXYCHOLATE

L’intérêt principal de l’amphotéricine B, qu’il s’agisse de sa forme conventionnelle (amphotéricine B-déoxycholate : Fungizone®)ou des différentes formulations lipidiques (Ambisome®, Abelcet®), réside dans son action fungicide, dans son large spectre qui inclut les levures (Candida, Cryptococcus, Saccharomyces), les champignons
dimorphiques (Histoplasma, Blastomyces, Sporothrix, Paracoccidioides) et les champignons filamenteux (Aspergillus, Mucor), ainsi que dans la faible incidence des résistances acquises. Son activité est très réduite vis-à-vis de C. lusitaniæ et il existe des résistances chez Fusarium sp., Scedosporium sp. et Trichosporon sp.

DÉRIVÉS TRIAZOLÉS : FLUCONAZOLE, ITRACONAZOLE, VORICONAZOLE ET POSACONAZOLE

Leur mode d’action principal est l’inhibition d’une déméthylase fongique qui permet la transformation du lanostérol en ergostérol, élément essentiel de la paroi membranaire fongique. Ils sont le plus souvent fongistatiques.

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La dernière référence en la matière publié par la SFAR date de 2018 : OPTIMISATION DU TRAITEMENT PAR BETA-LACTAMINES CHEZ LE PATIENT DE SOINS CRITIQUES

Date de dernière mise à jour : 23/06/2020

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