Objectif
- connaître les différents types de complications respiratoires du réveil d’une AG et savoir comment y faire face
- connaître les différentes complications CVX du réveil d’une anesthésie générale et savoir comment y faire face
- connaître les différents stades du réveil normal après une AG
- savoir à quoi peut être dû un réveil retardé après une anesthésie générale
- connaître les particularités de la surveillance en SSPI après une ALR
- connaître les points sur lesquels porte la surveillance d’un patient en salle de SSPI après un acte thérapeutique et/ou diagnostique
INTRODUCTION
- La période de réveil est une phase critique au cours de laquelle surviennent près de la moitié des accidents imputables à l’anesthésie.
En raison des risques liés
- aux effets résiduels de l’anesthésie
- aux conséquences de l’acte pratiqué
- à la pathologie préexistante du patient,
susceptibles de survenir durant les premières heures suivant un acte thérapeutique et/ou diagnostique réalisé :
- sous AG
- sous ALR
- sous sédation,
une surveillance continue post- interventionnelle est recommandée.
"Période critique pendant laquelle surviennent une grande partie des accidents anesthésiques ( respiratoires et cardiovasculaires ) attribués à l’insuffisance des structures assurant la surveillance post opératoire"-Rose et al Anesthesiology 94 , Rothe et al Anesth Analg 91-
- Disparition progressive des effets résiduels de l’anesthésie
- Apparition des conséquences de l’acte chirurgical
Epidémiologie
De nombreuses études tant en France qu’à l’étranger ont montré que :
la plupart des complications de l’anesthésie surviennent au réveil « 14% des patients développent des épisodes hypoxiques au moment du réveil( Morris 1988 ) »
les complications de l’anesthésie sont plus fréquentes après anesthésie générale qu’après anesthésie locorégionale
les complications sont plus fréquentes
- après chirurgie abdominale ou orthopédique
- dans la chirurgie d’urgence
- en cas de complications peropératoires
- dans les stades ASA élevés
les complications respiratoires sont plus fréquentes chez l’enfant
EFFETS DE L'AGE ET A.S.A
Les complications respiratoires semblent survenir indépendamment de l'ASA.
Parmi les 60 accidents respiratoires graves de l'enquête INSERM; 45 % concernaient des sujets ASA I. Leur pronostic était grave car ces complications entrainaient la mort dans près de 30 % des cas chez les ASA 1.
En fait les sujets ASA II, III, IV sont toujours mieux surveillés de la part des anesthésiologistes, et les complications respiratoires sont attendues.
1- Complications respiratoire
la plupart des complications respiratoires sont liées à des surdosages.
Les facteurs de risque sont:
- âge >60 ans
- Obésité
- Diabète
- interventions de plus de 4h
- nature de l’acte opératoire
- chirurgie abdominale
- chirurgie ORL
- chirurgie de l’enfant
- chirurgie en urgence
- type d’anesthésie
- agents à longue durée d’action
- surdosage
- curarisation prolongée
Effets résiduels de l’anesthésie sur la fonction respiratoire
Les anesthésiques
- dépriment les chémorécepteurs périphériques et des centres respiratoires et diminuent ainsi la réponse à l’hypoxie et à l’hypercapnie
- réduisent le tonus dilatateur des muscles des voies aériennes supérieures entraînant une obstruction par collapsus
- dépriment le réflexe de déglutition
Toutes ces altérations sont majorées par:
- l’âge avancé du patient
- l’altération de la mécanique respiratoire
- l’altération du parenchyme pulmonaire
- l’obésité
- le syndrome d’apnée du sommeil
Obstruction des voies aériennes
Complication respiratoire postopératoire la plus fréquente, son mécanisme est semblable à celui du syndrome d’apnées du sommeil associant
- hypotonie de la musculature oropharyngée
- dépression des mécanorécepteurs.
Elle se traite par
- mise en place d’une canule oro ou nasopharyngée
- hyperextension de la tête
- injection d’antagonistes des curares ou des morphiniques
- réintubation.
Chez l’enfant il s’agit parfois d’un laryngospasme dont l’incidence diminue si l’extubation est réalisée soit sous anesthésie profonde, soit après réveil complet et à la fin d’une inspiration profonde.
Plus rarement il peut s’agir
- d’une paralysie récurrentielle après thyroïdectomie
- d’un hématome ou d’un oedème de la endobuccale ou intubation difficile.
Le taux de réintubation en SSPI est de O.2% mais 7% des accidents graves sont liés à l’extubation ( Mathew AA 96 )
Hypoxémie postopératoire
Facteurs prédisposant
- durée de l’anesthésie de plus de 2h
- anesthésie générale
- âge
- tabagisme
- obésité.
Facteurs aggravants
- frissons post-anesthésiques
- bas débit cardiaque
- pneumothorax
- atélectasie segmentaire ou pulmonaire
- intubation sélective
- bronchospasme
- œdème pulmonaire.
Le monitorage de la SpO2 en facilite le diagnostic, mais la surveillance clinique garde son importance dans la détection des épisodes d’hypoventilation et d’obstruction des voies aériennes
Inhalation du contenu gastrique
Complication rare mais redoutable
plus fréquente dans les interventions en urgences ou au décours des sédations intenses au réveil.
semblant inexistante avec les anesthésies locorégionales.
Le diagnostic repose sur:
- l’existence d’accès de toux
- la présence de sibilants à l’auscultation pulmonaire
- la désaturation <90%
- la présence de liquide gastrique dans les voies aériennes
- l’existence d’un infiltrat sur la radiographie pulmonaire
2- Complications cardiaques
Le réveil constitue une épreuve d’effort pour le myocarde : l’agitation, les frissons,l’hypercatécholaminémie augmentent :
- la consommation d’oxygène
- la fréquence cardiaque
- les besoins en oxygène du myocarde.
L’hypercatécholaminémie augmente le travail du ventricule gauche.
Le réveil s’accompagne d’une augmentation de la précharge en raison :
- levée de l’effet vasoplégique des anesthésiques
- arrêt de la ventilation en pression positive
- veinoconstriction périphérique
Hypotension artérielle
Complication cardiovasculaire la plus fréquente dont les facteurs de risque sont
- hypotension peropératoire
- chirurgie abdominale ou gynécologique
- sexe féminin
- score ASA élevé.
Elle est due :
- le plus souvent à une hypovolémie, absolue par compensation insuffisante des pertes ou relative par effet vasoplégiant résiduel
- plus rarement à une hémorragie postopératoire, à un choc septique ou à un choc cardiogénique.
Elle se traite par :
- remplissage vasculaire par cristalloïdes
- évaluation de la précharge ventriculaire en cas de persistance
- vasopresseurs utiles dans environ 20% des cas
Hypertension artérielle
Elle a plusieurs origines :
- douleur
- hypercapnie
- hypoxie
- nausées et vomissements postopératoires
Facteurs de risque :
- âge avancé
- score ASA 3 ou 4
- antécédents d’HTA ou pathologie rénale préexistante
Elle doit être impérativement traitée car peut être source de :
- hémorragie
- infarctus du myocarde
- défaillance cardiaque
- troubles du rythme
Son traitement comporte dans l’ordre :
- analgésie efficace
- vasodilatateurs comme les dérivés nitrés ou les anticalciques
Troubles du rythme cardiaque
Les plus fréquents sont :
- tachycardie sinusale
- bradycardie sinusale.
Plus rares, mais aussi plus graves et accompagnant souvent une atteinte cardiaque préexistante sont :
- extrasystoles ventriculaires
- arythmies ventriculaires graves.
La bradycardie postopératoire se voit surtout en cas de traitement par bêtabloqueurs, chez le sujet âgé, chez les patients ASA 1 ou 2 et s’accompagne fréquemment de nausées et de vomissements. Elle se traite par l’atropine.
La tachycardie s’observe surtout au décours d’interventions réalisées en urgence ou qui ont duré plus de 4h, ou qui s’accompagnent d’hypovolémie et peut accompagner une hypoventilation, un réveil agité ou des frissons. La tachycardie est le principal facteur d’ischémie myocardique en cas de réserves coronaires limitées, ce qui justifie parfois une prévention par bêtabloqueur ou
secondairement une surveillance en USI.
Les arythmies postopératoires sont favorisées par l’hypokaliémie, l’hypoxie et les troubles métaboliques.
Accidents cardiaques sévères
L’ischémie myocardique et la défaillance cardiaque sont rares. L’ischémie myocardique doit être prévenue par :
- une stabilité tensionnelle
- une normoxie
- l’absence de frisson et donc un réveil complet seulement après normothermie
- le traitement des troubles du rythme.
3- RETARD DE RÉVEIL
Il est le plus souvent dû à :
- surdosage absolu ou relatif en anesthésiques en rapport avec
- approfondissement excessif de l’anesthésie devant des manifestations cardiovasculaires
- interactions médicamenteuses
prise antérieure de psychotropes
potentialisation des hypnotiques par les morphiniques
prémédication par une benzodiazépine de demi- vie longue
- désordres métaboliques peropératoires
- hypoglycémie
- hyponatrémie
- insuffisance hépatique
- désordres neurologiques peropératoires notamment AVC après neurochirurgie ou chirurgie carotidienne ou cardiaque
4- Hypothermie et frissons
Une hypothermie modérée comprise entre 34 et 36°C s’observe chez 50% des patients anesthésiés ; les causes en sont :
- vasodilatation périphérique et redistribution de la température
- abaissement du seuil de déclenchement des réponses physiologiques à une hypothermie
- abolition des mouvements volontaires et du frisson
- température ambiante trop froide
- apports liquidiens massifs hypothermes
L’hypothermie retarde le réveil en abaissant la MAC des halogénés et fait apparaître une curarisation résiduelle au réveil.
La dépense énergétique nécessaire au rétablissement de la normothermie majore la consommation en oxygène. Le frisson s’accompagne d’une hypercatécholaminémie et d’une vasoconstriction entraînant une augmentation de la pression artérielle et du débit cardiaque. Le frisson répond bien aux morphiniques et aux alpha-2 agonistes.
5- Nausées et vomissements postopératoires (NVPO)
Fréquents, ils surviennent chez 10% des patients en SSPI et outre l’inconfort qu’ils procurent, ils peuvent être responsables d’inhalation ou compromettre le résultat chirurgical. Ils sont la première cause d’hospitalisation imprévue en chirurgie ambulatoire.
Les facteurs de risque sont :
- jeune âge
- femme en période d’activité génitale
- sujet anxieux en préopératoire
- antécédent de mal des transports
- absence de tabagisme.
Le traitement repose sur agonistes dopaminergiques (dropéridol) et antagonistes spécifiques des récepteurs 5-HT3 de la sérotonine (sétrons).
6- Complications urinaires postopératoires
La rétention urinaire est fréquente après anesthésie rachidienne.
Le développement d’un insuffisance rénale postopératoire est multifactoriel :
- hypovolémie peropératoire
- ischémie rénale
- utilisation de produits potentiellement néphrotoxiques (anti-inflammatoires, aminosides,produits de contraste)