I. INTRODUCTION
L’évaluation de la douleur est un préalable indispensable à toute démarche thérapeutique.
Le choix des outils nécessite un travail au sein de l’équipe. Celle-ci prendra en compte l’âge et les pathologies des malades accueillis dans le service
II. BUT DE l’EVALUTION DE LA DOULEUR :
L'évaluation de la douleur vise à Identifier et définir une douleur afin de :
- Identifier et reconnaître des patients douloureux.
- Identifier les différents facteurs responsables de la douleur, de son entretien, de ses variations, de façon à ajuster la thérapeutique à l'étiologie parfois complexe
- Déterminer une attitude thérapeutique (choix d'une molécule).
- Adapter un traitement (posologies efficaces).
- Transmettre une information claire et pertinente aux autres intervenants de la prise en charge.
- Améliorer la relation soignant/soigné afin d'installer un climat de confiance et de Collaboration.
- Améliorer la qualité et l'efficacité de la prise en charge du patient.
- Assurer le suivi de l’efficacité des prescriptions.
III. COMMENT EVALUER
La qualité de l'évaluation de la douleur dépend des informations recueillies auprès du patient.
Toutes les données recueillies sont écrites dans le dossier ou sur une grille d'évaluation.
Le nombre d’évaluations effectuées dans la journée dépend de l'intensité de la douleur et des besoins du patient.
Le dossier est très utile car il est important de garder trace des informations. Ceci permet de coordonner l'activité de tous et d'éviter l'improvisation.
A. RECUEIL DE DONNEES
Il s'appuie sur l'histoire de la douleur vécue. Il faut rechercher les informations suivantes :
- L’histoire de vie du patient : familial, affectif, activité professionnelle, origines culturelles, permettent de situer la plainte douloureuse dans le contexte du patient.
- Antécédents médicaux, chirurgicaux, obstétricaux, psychiatriques et familiaux
- Circonstances de déclenchement de la douleur
- Description de la douleur initiale et actuelle : topographie, type de douleur, intensité ; facteurs augmentant ou diminuant la douleur (position, chaud, froid, distraction..)
- Modalités de la prise en charge initiale
- Evolution selon la prise en charge
- Profil évolutif sur le nycthémère, facteurs d'aggravation et de soulagement.
- Retentissement sur la qualité de vie, le sommeil, activités personnelles professionnelles…
- Existence de procédures judiciaires, sociales administratives en cours.
- Rechercher également tous les événements de la vie (agressions physiques psychiques, éventuellement à caractère sexuel, deuils…).
B. OUTILS D'EVALUATION
L'outil employé doit être adapté aux possibilités du patient.et doit répondre à différents critères :
- Pertinence, spécificité, cohérence.
- Fiabilité, exactitude, objectivité.
- Simplicité, facilité, clarté.
- Etre connu de tous et reproductible.
Différents outils, validés, sont actuellement disponibles. Ils sont de trois types :
unidimensionnel, pluridimensionnel, comportemental
1. Échelles unidimensionnelles
Elles mesurent l'intensité de la douleur, sont simples, reproductibles, fiables et validées :
Ces échelles d'autoévaluation utilisées directement par le patient, chez l’adulte et l’enfant > 6ans (communiquant).
a) L'ECHELLE VISUELLE ANALOGIQUE (EVA)
Cette échelle est la plus utilisée simples, reproductibles, fiables, sous forme de réglette, celle-ci comporte deux faces :
• Sur la face présentée au patient se trouve un trait horizontal de 10 cm avec à chaque extrémité un qualificatif , à gauche "pas de douleur", à droite "douleur maximale imaginable",
• Sur la face évaluateur, il y a une graduation de 0 à 10 cm.
On demande au patient de déplacer le curseur figurant sur la réglette et le soignant relève le chiffre correspondant à l'endroit où le patient a placé ce curseur.
b) L'ECHELLE VERBALE SIMPLE (EVS)
L'EVS est moins sensible que l'EVA. C'est une échelle d'auto-évaluation dans laquelle on retrouve en 5 descripteurs ordonnés : Le patient décrit l'intensité de la douleur :
«Absente» = 0, «Faible» = 1, «Modérée» =2, «Intense» = 3, « Extrêmement intense » = 4
c) L'ECHELLE NUMERIQUE (EN)
Il est proposé au malade de donner un chiffre à sa douleur. Ce chiffre est compris entre 0 et 10, zéro correspondant à l'absence de douleur, et 10 à la douleur maximale imaginable.
Moins utilisée que les deux autres échelles, elle permet de mesurer l'intensité de la douleur d'un malade qui, pour des raisons de langage par exemple, ne serait pas en mesure d'intégrer les qualificatifs utilisés dans les EVA ou EVS.
2. Échelles comportementales
Elles permettent une hétéroévaluation lorsque l'expression verbale est impossible ou altérée :
- Enfants en bas âge
- Patients atteints de troubles cognitifs, de la conscience (confusion, coma)
- Ou maladies psychiatriques sévères (psychose).
Reposent sur l'observation par les soignants des modifications de l'attitude, du comportement et des manifestations corporelles du patient douloureux, Exp : Doloplus, Algoplus, Evendol chez l'enfant…
3. Échelles multidimensionnelles
Les échelles multidimensionnelles s'intéressent aux caractéristiques de la douleur et à leur retentissement sur la qualité de vie. La plus utilisée est le questionnaire Douleur de Saint-Antoine DN4 pour la douleur neuropathique… Les questionnaires sont divisés en plusieurs rubriques ou catégories et chaque catégorie comprend des sous-classes.
Ces échelles plus complexes à manipuler sont essentiellement utilisées dans le cadre de l'évaluation d'une douleur chronique. Les plus connues sont :
- le MPQ (Mac Gill Pain Questionary) élaboré par Melzack et Wall
- le QDSA (Questionnaire Douleur Saint-Antoine) adaptation française du MPQ.
Comporte 58 qualificatifs répartis en 16 sous-classes, 9 sensorielles et 7 affectives.
Il permet de mesurer l'efficacité de la thérapeutique sur chacune des dimensions, sensorielle et émotionnelle. Il n'est pas indiqué en cas de :
- Douleur intense.
- D'extrême fatigue.
- Chez des patients de niveau socioculturel trop bas.
- Dont le français n'est pas la langue maternelle.
EVALUATION DE LA DOULEUR CHEZ L'ENFANT
RECONNAITRE LA DOULEUR D'UN ENFANT
Pour aborder un enfant douloureux, il est nécessaire de faire preuve de patience et d'attention, de l’observer à distance, et de lui laisser la possibilité de rester dans les bras de ses parents.
L'interrogatoire des parents complétera les observations recueillies : qualité du sommeil, capacité de se consoler, troubles de l'alimentation.
CHEZ LE NOUVEAU-NE
L'observation de l'enfant nouveau-né en pédiatrie portera sur deux types de manifestations :
LES MODIFICATIONS NEUROVEGETATIVES
- Tachycardie
- Fréquence respiratoire modifiée
- Hypertension artérielle
- Désaturation de l’hémoglobine en oxygène
- Augmentation du rythme respiratoire
- Augmentation des besoins en oxygène
- Cyanose générale
LES MODIFICATIONS COMPORTEMENTALES
- Agitation
- Crispation
- Modification de la tonicité
- Mouvements de défense
- Consolabilité difficile à obtenir
- Succion perturbée
LES ECHELLES D'EVALUATION
Il existe de nombreuses échelles d'évaluation de la douleur:
- L’échelle de douleur et d'inconfort du nouveau-né (EDIN) repose sur 5 items (visage, corps, sommeil, relation, réconfort). Elle est utilisée en cas de situation douloureuse durable et elle nécessite un temps d'observation prolongée du bébé (4 à 8 heures)
- Le score AMIEL-TISON permet d'évaluer la douleur post-opératoire
- L’échelle CRIES prend en compte les pleurs (Crying) les besoins en oxygène (Requir O2 for saturation > 95), l'augmentation des paramètres vitaux (Increased vital signs), l'expression faciale (Expression), le degré d'insomnie (Sleepless).
Elle est plus centrée sur les douleurs aiguës. Il existe une variante destinée aux prématurés (Premature Infant Pain Profile ou PIPP).
CHEZ L'ENFANT PLUS GRAND
Chez l'enfant plus grand, l'utilisation de l’EVA, l’EN ou l’EVS est possible. D’autres modalités d’évaluation existent :
- Les planches de visages sur lesquelles figurent des expressions correspondant à des intensités de douleur.
- L’utilisation du dessin et du schéma corporel permet à l'enfant de colorier l'endroit de sa douleur.
- Les algocubes : on propose à l'enfant un jeu de cubes de différentes tailles et on lui demande de choisir le cube dont la taille correspond à l'intensité de sa douleur.
- Le score CHEOPS destinés plus spécifiquement à l'évaluation de la douleur postopératoire.
- L'échelle DEGR enfin, pour l'évaluation des douleurs chroniques, c'est (Douleur Enfants Gustave Roussy) qui es utilisée .
EVALUATION DE LA DOULEUR CHEZ LE SUJET ÂGE
Les perceptions douloureuses du sujet âgé sont identiques à celles du sujet jeune mais l'âge semble agir comme "un modulateur de la souffrance". Plusieurs facteurs sont à l'origine de cette différence : altérations des fonctions supérieures responsables de difficultés d'expression de la douleur (aphasie, démence,..), la diminution spontanée des activités peut faire passer inaperçues certaines affections.
Plusieurs outils sont à notre disposition. Outre l'EVA ou l'EVS qui peuvent être utilisées si l'état mental du sujet le permet, on pourra faire appel aux échelles comportementales qui
permettront d'étudier à la fois le retentissement somatique et psychomoteur de la douleur sur les actes de la vie quotidienne. Exp : DOLOPLUS, ALGOPLUS……